L’arrivée des Harkis dans le Lot-et-Garonne
Sources des Archives de France
Les Archives de France mettent à disposition des ressources historiques accessibles à tous ceux qui le souhaitent.
Vous trouverez des documents répertoriés à la suite de l’arrivée en France de plusieurs milliers d’anciens supplétifs et de leurs familles après la guerre d’Algérie.
La Commission propose ici des documents sur l’arrivée et l’installation des Harkis dans le Lot-et-Garonne
L’arrivée et l’installation des Harkis en France, l’exemple du Lot-et-Garonne
À leur arrivée en 1962, de nombreux Harkis sont regroupés dans des camps de transit et de reclassement ouverts dans le sud de la France. Leur séjour y est considéré comme temporaire, le temps de faciliter leur insertion dans la société française par l’obtention d’un emploi et d’un logement. Dans le Lot-et-Garonne, des familles sont dirigées vers le camp de Bias, dans lequel des républicains espagnols, des résistants et des collaborateurs ont été auparavant internés ; d’autres sont accueillies et aidées par des particuliers comme le capitaine René-Pierre Froument.
Construit sur un domaine militaire, le camp de transit et de reclassement de Bias, après avoir abrité de septembre à décembre 1962 un premier groupe de Harkis, est mis à la disposition du ministère des Rapatriés par celui des Armées en janvier 1963 [illustration 1] et devient une cité d’accueil des rapatriés d’Algérie (CARA), à l’instar du camp de Saint-Maurice-l’Ardoise (Gard) en 1964.
Destiné dorénavant à héberger les familles et les célibataires considérés comme « difficilement récupérables » (invalides, blessés, veuves, vieillards, malades, etc.) [illustrations 2 et 3], il est dirigé par un capitaine de réserve, ancien responsable d’une section administrative spécialisée (S.A.S) et dispose d’un encadrement militaire, d’un service de santé et d’une école, dont le personnel enseignant était auparavant affecté en Algérie [illustrations 1, 2, 6].
Le 18 janvier 1963, 400 Harkis venant de Saint-Maurice-l’Ardoise, qui a atteint le maximum de ses possibilités d’hébergement, arrivent à Bias [illustration 4] ; ils sont 1 300, dont 650 enfants, à y vivre le mois suivant [illustration 6] dans des conditions très difficiles [illustrations 5, 6, 7, 8, 9], qui provoqueront leur révolte en 1975.
D’autres Harkis sont présents dans le Lot-et-Garonne depuis avril 1962, dès les lendemains des accords d’Evian et du cessez-le-feu. Le capitaine Froument, chef de la S.A.S d’Aïnt Tin (ancien département de Constantine) et originaire de Villeneuve-sur-Lot, a en effet organisé le départ de ses anciens supplétifs et de leurs familles dès janvier 1962 en se procurant auprès d’un de ses amis secrétaire général d’une commune du département des attestations d’hébergement vierges, mais validées par l‘administration.
À son retour en France, suivi par une vingtaine de familles, il est affecté successivement aux camps du Larzac (Aveyron) et de Rivesaltes (Pyrénées-Orientales) pour s’occuper des réfugiés, qu’il reclasse dans le Lot-et-Garonne.
Bénéficiaires de l’allocation mensuelle de subsistance allouée aux rapatriés pendant un an par le décret du 10 mars 1962 - 350 francs (environ 547,30 Euros) pour les célibataires et 450 francs (environ 703,67 Euros) pour les familles [illustration 7] -, les Harkis doivent trouver à s’employer et le sont souvent, car peu qualifiés, grâce à des interventions directes [illustrations 7, 10, 13].
Bien que « difficilement reclassables » [illustration 6], les hommes valides de Bias sont manœuvres ou journaliers, les femmes travaillent dans les champs, et il est envisagé en février 1963 d’installer un atelier de tissage de tapis dans le camp, comme il sera fait à Saint-Maurice-l’Ardoise l’année suivante [illustration 7].
Le capitaine Froument héberge certains de ses anciens Harkis et leurs familles [illustration 16], auxquels il a pu éviter de passer par les camps, à son domicile de Villeneuve-sur-Lot et les fait embaucher par une entreprise de tuiles et une conserverie locales, avant qu’ils ne trouvent à se reloger sur place [illustration 10].
En décembre 1962, il loge un autre de ses anciens Harkis et sa famille, venus de Rivesaltes, emploie la mère comme auxiliaire de vie et a déjà fait recruter le père comme manœuvre par une entreprise de construction de la commune [illustration 10].
D’autres sont employés et hébergés dans des exploitations agricoles [illustration 12], dont l’un sur recommandation [illustration 13], parfois par des agriculteurs rapatriés d’Algérie [illustrations 13, 14].
L’arrivée et l’installation de cette population étrangère au département est particulièrement surveillée par les autorités préfectorales et les Renseignements généraux, qui craignent les réactions de la population locale face à une trop forte concentration d’individus d’origine nord-africaine et l’activisme de l’OAS, la France étant encore en proie aux tensions générées par la guerre d’Algérie [illustrations 2, 4, 7, 12, 13, 14, 15].
La fiabilité des employeurs et de leur proposition d’embauche est examinée : une enquête est menée sur le capitaine Froument [illustrations 10, 11], comme sur les deux exploitants agricoles rapatriés, l’un d’eux étant en outre connu pour ses opinions anti-gaullistes et astreint à résidence [illustrations 12, 13]. Le comportement depuis leur arrivée en France des employés Harkis et leur éventuel signalement par les Renseignements généraux sont vérifiés, et parfois même la sincérité de leur engagement en faveur de la France [illustrations 10, 13].
Ces recrutements n’ont pas de conséquences sur le marché local de l’emploi pourtant saturé [illustration 14], mais embarrassent les maires des petites communes rurales, qui redoutent des désordres parmi leurs administrés, notamment lors de l’arrivée de Harkis célibataires [illustrations 12 et 14].
En savoir plus sur le service interministériel des Archives de France
Le Service interministériel des Archives de France (Ministère de la Culture) définit, coordonne et évalue l'action de l'État en matière d’archives (à l'exception de celles relevant des ministères des Armées, et de l'Europe et des Affaires étrangères), dans un réseau de près de 800 services d’archives publiques (Archives nationales, départementales, communales et régionales), en matière de collecte, de tri, de classement, de description, de conservation, de communication, de diffusion et de mise en valeur.
Portail France Archives sur les Harkis
Le portail interministériel FranceArchives offre un accès fédéré aux métadonnées archivistiques de près de 150 institutions tout en les valorisant, notamment grâce à des guides numériques de sources comme celui sur les Harkis.